TRISTESSE AU JARDIN DES HESPERIDES

L'Argolide est un grand jardin qui sent bon la fleur d'oranger et de citronnier

Sur l'itinéraire "Bis" (déviation qui permet de contourner Argos) on passe entre les orangeraies et à la floraison, l'odeur est presqu'insoutenable, souvent ennivrante.

Mais en ce moment, ce trajet n'est que triste spectacle! Alors que la saison touche à sa fin et que la récolte devrait être terminée,  les producteurs du beau fruit cherchent encore désespérément à qui vendre leur produit. Vous verrez donc  les arbres chargés de fruits  (non récoltés)  et même de fleurs (car en plus! certains ont eu une floraison prématurée). Bientôt les fruits vont tomber et pourriront au pied des arbres...Il semblerait que les acheteurs potentiels venus du nord de la Grèce ne soit pas descendus cette année, provocant la désolation...

On ne s'étonnera donc pas des barrages et de la mobilisation des agriculteurs grecs qui font la une des journaux depuis une dizaine de jours, bloquant routes et péages!

L'exemple des oranges est significatif: les producteurs (quand ils arrivent à les vendre!) touchent en ce moment jusqu'à 15 centimes le kilo. Après retenues diverses, on arrive à 10 centimes nets!  Pour certains, la baisse spectaculaire du prix de l'orange est une catastrophe! Le produit de la vente sert à peine à rembourser les frais d'entretien et de récolte. (et l'oranger est un arbre fragile qui demande des soins constants)

Le pire c'est qu'elles sont souvent vendues aux coopératives pour la fabrication de jus de fruits industriels, alors que leur qualité gustative en fait une des meilleures oranges d'Europe, juteuse et sucrée à souhait! Quel gachis!...je ne comprendrai jamais ces histoires de quotas et d'autorisation ou d'interdiction à l'exportation de l'Union Européenne...un système dont je ne vois que le résultat: de magnifiques oranges déversées sur la route par des agriculteurs en colère......

Crédit photo: EUROKINISSI

Ce matin j'ai entendu un journaliste Grec dire: "je n'ai jamais compris pourquoi on trouve des oranges d'Israël sur le marché grec, alors que nos oranges sont jetées ou pourrissent"....OUF! Me voilà rassurée.....il n'y a pas que moi qui n'y comprend rien!

Les économistes et tous ceux qui Y comprennent quelque chose sont les bienvenus pour laisser leur commentaire et leurs explications...

Comments

[Nafpliotissa]

Merci à Ruth, Scalpa (j'admire ta discipline!) Mary Athènes et Melpo! De vos commentaires, vos explications et votre vécu...oui, ces oranges méritent bien notre considération!

[melpo]

Oui , comme on dit en grec , c'est" Fovéro!" , cette mévente de ces sublimes oranges argiennes qui ont une saveur unique ! sans parler des enivrants parfums des orangeraies qui embaument toute la plaine d'Argolide et vous remplissent le coeur de joie! ...avant que monte en effet notre révolte face à cet absurde système d'économie qui va sinistrer cette région! Mais quelle est grande , à nous citoyens Lambda ,notre impuissance ! Est-ce que les oranges une fois cueillies se conservent bien et longtemps? excusez ma question naîve et béotienne! ne pourrait- on s'organiser pour en importer à titre privé, même à petite échelle, sorte de collectif des "amis del'orange grecque" ? Bien sûr , la crise de fond subsistera pour les agriculteurs , mais lecombat pour ce fruit si précieux doit être mené sur tous les fronts

[scalpa]

c'est pour cette raison que je n'achete que les produits du pays ou je me trouve, une goutte d'eau mais que faire d'autre en tant que consommateur, meme si parfois cela est plus cher c'est de toutes facons plus frais je n'irais jamais acheter des oranges israelienne ou des fraises du chili et encore moins des bananes, mes filles se gavent en ce moment d'oranges grecques nauplie ou laconia et de kiwi du nord
cette situation est ubuesque au nom de l'economie de marche, c'est n'importe quoi !!
bonne journee

[MaryAthenes]

C'est terrible ! Pour tous ces agriculteurs bien sur mais j'ai un pincement particulier au coeur car j'adore cette region et ces orangeraies... quel gachis devoir perir ces fruits, quel sacrilege...

[Ruth]

En fait, les pays ont conclu entre eux des ententes de pseudo libre échange. Pour que ses oranges, par exemple, puissent entrer en masse en Grèce (ou ailleurs), Israël subventionne très grassement ses «agriculteurs» (dans ce cas-là, on parle de producteurs parce que ce n'est plus de l'agriculture) ce qui leur permet de vendre à l'étranger à prix très très bas qui ne tiennent absolument pas compte du coût réel de production en raison, justement, des subventions. Les pays «en voie de développement» incapables de subventionner leurs paysans les obligent - en raison de ces ententes de libre échange - à accepter de vendre à des prix inférieurs à ce qu'il leur en coûte pour produire ces oranges. Le paysan qui veut vous vendre ses oranges ne pourra même pas faire concurrence aux autres. C'est entre autres causes ce qui s'est passé avec l'immigration des Mexicains vers les États-Unis: les producteurs états-uniens ont envahi le marché mexicain avec des fruits et des légumes au coût si bas que les Mexicains ne pouvaient plus vendre leurs propres aliments, déclaraient faillite et devaient aller ailleurs vendre le travail de leurs mains pour pouvoir continuer de vivre - et pauvres comme ça, on devrait dire survivre plutôt que vivre. C'est ce qui se passe un peu partout sur notre boule bleue. Les économies locales sont tuées au profit de quelques richissimes industries agricoles -les mêmes partout. D'où l'importance de l'achat local, d'où l'importance de veiller à la provenance des fruits et des légumes que l'on achète, d'où l'importance de surveiller l'empreinte écologique des aliments que nous consommons. Si l'orange que vous achetez d'Israël en Grèce parcourt un mille ou deux mille kilomètres pour vous arriver en plus d'être subventionnée à la hauteur quasiment son prix de production et que ces dépenses n'entrent jamais dans le coût réel, le petit paysan chez vous n'a aucune chance et n'a pas la possibilité de gagner sa vie décemment.